mercredi 5 mars 2008

Le 11ème Rallye Monte Carlo Historique vu par Alain Aufauvre

Alors ? ? Me direz vous - Ce 11ème Rallye Monte Carlo Historique? Comment ça c’est passé ???
Vous avez vu internet = résultat brut = 59ème place = pas vraiment billant.
Depuis que je sais que vous connaissez les résultats, je longe les murs d’Aix, je me fais tout petit. C’est vrai que si j’avais été sur la 1ère marche du podium, la France entière le saurait et même les frasques de Sarkozy ou de Albert de Monaco seraient passées au deuxième rang des préoccupations des français. Seulement c’est ainsi, nous sommes 59ème et nous sommes carrément mauvais.
Pourtant tout avait bien commencé. Le parcours de concentration s’était très bien déroulé. Un temps hivernal, sans neige, sans brouillard, une nuit idéale. Titine ronronnait gentiement, ma copilote préférée suivait son roadbook, ses cartes, son horloge avec minutie : les contrôles de passage s’effectuaient avec précision. Le rêve. La matinée fut un peu fastidieuse et l’arrivée à Valence fut une vraie délivrance. Le lendemain les affaires sérieuses commençaient :1ère zone de régularité : Saint Pierreville-Antraigues : le terrain est sec, la route relativement facile. Le contrôle se situe à la sortie de la 7ème épingle à cheveux où nous emmagasinons 79 points (7secondes et 9/10). C’est très bien car durant ces 7 épingles, je peux vous assurer que nous n’avons pas amusé le terrain. Surprise à l’arrivée nous ne sommes 51ème,nous sommes alors persuadés que des adversaires connaissaient précisément le point de contrôle. Erreur, il y avait également un premier contrôle juste avan les 7 épingles. Ceux qui ont donc pris de l’avance en sont pour leur frais. Nous nous prenons 7 points (7/10ème de seconde), et enfin au 3ème contrôle nous prenons 23 points ce qui est encore plus que raisonnable. 50 concurrents nous précèdent : ils sont très très affutés.
La deuxième ZR – le Burzet : sur le plateau la burle souffle si fort, que nous ne voyons plus la route, tant la neige la recouvre, de plus le brouillard est très épais, les conditions météo sont donc très difficiles. Cependant nous sommes ravis de nos performance, nous prenons 16 et 14 points aux 2 contrôles : 30 points nous ne sommes que 42ème. La concurrence est vraiment très vive.
3ème épreuve à Saint Bonnet le Froid : Régis Marcon fait de gros travaux d’agrandissement, son établissement est fermé (tant pis Béné, nous dînerons plus tard). Ici le terrain est sec, nous marchons très bien : nous sommes 6ème après avoir pris 3 et 6 points, malgré cela il y en a encore 5 qui nous précèdent. Qu’est-ce qu’ils sont forts !!!!
Nous terminerons la journée par Lalouvesc. Là encore, nous marchons très bien : au 1er contrôle, 13 points au deuxième contrôle nous passons à 0. Un exploit, mais un exploit qui se réalise souvent lorsque l’on regarde les classements. Seulement avec 13 points nous ne sommes que 8ème car le premier n’a pris que trois points. C’est fou ce que la concurrence est pointue.
Seulement voilà, dans ce rallye, on ne nous demande pas de faire des coups d’éclat, mais au contraire d’être réguliers. Et le premier soir, je félicite ma copilote préférée car nous savons que nous avons bien marché tout au long de la journée. Effectivement nous sommes 7ème au classement général, 1er équipage mixte, et premier équipage français.


Nous passons une bonne soirée dans le bistrot de Michel Chabran à Valence, avec les membres du Three Quarter Team , et nous partons nous coucher de bonne heure dans notre hôtel merdique.


Le lendemain matin, il pleut à verse à Valence, et la météo s’annonce mauvaise dans le Vercors. Effectivement nous avons mangé notre pain blanc, et le pain noir noir charbon fait son apparition. Le col de l’Echarasson : celui qui ne nous fait plus peur. Tu parles !!!!! La tempête de neige, le brouillard, aucune visibilité, impossible de trouver la route ou ce qui y ressemble. Un calvaire, non un enfer. Nous roulons à 10 km/heure, alors que la moyenne fixée est de 49,7 km/h. La Bérézina. Un monumental tête à queue, une sortie de route puis un retour sur la route sans que je sache comment, une véritable galère. Résultat 105ème et 3245 points dans la musette. Il y en donc 225 qui sont plus mauvais que nous. Ca ne nous remonte pas le moral pour autant. Rebelote dans la 6ème ZR. Nous n’avons pas envie de faire de triple salto, nos roulons comme des petits vieux. Sans frayeur mais toujours sans aucune visibilité. 209ème 4057 points (pratiquement 7 minutes dans la vue. Avec ça madame, faut-il vous l’envelopper. Pendant ce temps les gros numéros, genre 280 , 300 , 310 , roulent au soleil car, ils sont partis quatre ou cinq heures après les petits numéros (dont je fais partie) (départ de minute en minute) et foncent dans les rails tracés par les 250 prédécesseurs. Les jeux sont faits,la roulette russe que dis-je la roulette monégasque a bien fonctionné. Dans le col de Mens (7ème ZR) je prend une décision draconienne : je décide de prendre de l’avance au départ, car la neige nous attend certainement au sommet. Bingo, le contrôle est avant le sommet et 500 points dans la musette. Il est temps que j’aille me coucher. Mais un très long parcours routier nous attend jusqu’à Serre Chevalier ou nous devons pointer à l’heure. Les routes sont encombrées, la neige tombe à gros flocons, les camions sont en travers de la route, nous perdons un temps considérable et nous prenons cependant de gros risques pour pointer à l’heure, ce que nous faisons après de gros efforts. Nous arrivons à Briançon, nous avons le moral dans les baskets, mais nous nous consolons en comparant nos performances avec nos adversaires traditionnels.
101ème, nous sommes : une bonne soupe au pistou dans notre maison d’hôtes nous consolera.
Le lendemain le soleil est revenu ; le neige et le verglas sont bien présents. Nous n’avons pas d’assistance aujourd’hui. A la première pompe à essence, je me rend compte que la serrure de la trappe a essence est gelée. Dieu merci, l’assistance d’un concurrent me dépanne. Du liquide spécial serrure, plus la clef chauffée au briquet nous sortiront de ce mauvais pas. Les spéciales ne se déroulent pas trop mal, bien que Titine ne soit pas la voiture idéale sur neige tassée et verglas. Nous ne sommes plus que 83ème, ça va être dur pour viser le podium.
Enfin c’est la dernière nuit, la nuit de tous les espoirs, enfin pour certains, en général pour nous, c’est la nuit des désillusions.
Je suis pourtant remonté à bloc. Je sens le podium à ma portée car le jour du départ nous avons mis un cierge à la chapelle de Sainte Dévote, la patronne de Monte Carlo comme chacun sait (pas vrai Thieu Thieu).
Nous attaquons cette nuit pas le col de l’Ablé-Loda. Je marche comme une fusée, je double cinq concurrents partis avant moi, rien ne peut m’arrêter sur ce terrain hyper glissant, hyper piègeux, hyper verglacé, rien ne peut m’arrête dis-je, sauf un rail de sécurité que je m’emplafonne, exactement à l’endroit ou je ne m’y attendais pas. Il Barbiere de Séville, Carmen, Falstaff, Raimondi, Callas, Piaf, Halliday, Dessay, Domino se sont tous mis à hurler dans mes oreilles simultanément. Une véritable cacophonie de graves, de mi bémol, de do dièse, de ré majeur et de hurlements. Et pourtant j’ai supprimé la radio de Ttitine depuis au mois 10 ans. C’était comme si la sono mise à la disposition de Johnny au stade de France était reproduite telle quelle dans l’habitacle de Titine. La pauvre Titine choquée par l’impact s’était gentiement tue mais la sono s’était mise à délivrer d’un seul coup 3455229 décibels. Alors sans mot dire, j’ai détordu l’aile de Titine, puis suis reparti doucement comme on va aux champignons. Ce fut alors une douce promenade champêtre et nocturne jusqu’à l’arrivée à Monaco ou une 59ème place nous attendait.
LA HONTE.
A l’année prochaine
Alain Aufauvre